
Une des questions qui fait débat dans cette campagne présidentielle concerne le revenu d’existence, inconditionnel, minimum de base ou universel…
La première des questions, le préalable même doit être de savoir de combien il faut disposer chaque mois pour Vivre dans des conditions décentes et dignes.
La seconde question qu’il convient donc de se poser est évidemment le montant de ce revenu, s’il évacue ou intègre les mesures sociales qui accompagnent aujourd’hui les plus fragiles. Et en tout état de cause on peut se demander comment il est possible de proposer moins que le seuil de pauvreté…
A ce moment de notre réflexion, nous sommes pour le maintien du salaire en cas de licenciement et pour une indemnisation au niveau du SMIC de toutes les formes de chômage. Pour un droit réel à la formation, et contre ce revenu d’existence.
Contre pour plusieurs raisons, d’abord parce qu’il nous semble qu’un revenu d’existence, n’est pas susceptible de gommer les inégalités et de donner à chacun-chacune, un rôle, une place, une utilité sociale qui fasse sens et pas parce que nous pensons que cela peut être « dés incitatif » à la reprise d’un hypothétique emploi.
Et les salaires, ils seraient comment ? Moindres en fonction de ce revenu ? Que deviendrait le SMIC ?
Une autre vraie question, à qui le donner sur la planète ? Aux sept milliards de femmes et d’hommes, donc réellement Universel ? Ou seulement aux pays industrialisés, en capacité, au prix de la casse de mesures sociales et collectives de l’octroyer, afin de renvoyer chacune-chacun à sa seule individualité, à sa seule sphère privée contre le bien commun ?
Et ces pays "riches", ne le sont-ils pas parce qu’il a eu l’esclavage, le colonialisme, et que l’exploitation, le saccage même des pays dits "en développement", disons plutôt pauvres et surtout du Sud, continuent par le biais, des multinationales mais aussi des FMI, OMC, et autre Banque Mondiale ?
Comment aborderons-nous les questions de l’emploi ? Il y aura toujours des boulots ingrats, peu valorisants à faire, qui les effectuera dans le très hypothétique cas d’un revenu suffisant qui ne serait pas lié au travail ? Cela risque par ailleurs de faire baisser le prix du travail qui ne doit pas être présenté comme un coût.
Nous sommes au contraire d’accord avec ceux qui pensent que les richesses d’aujourd’hui nous sont communes, tant elles révèlent que nos pères et nos mères, nos grands-pères et grands-mères ont sué sang et eau, et que nous continuons dans ce système pour que tant de richesses soient accaparés par quelques uns.
Alors prenons les entreprises, abolissons l’héritage (hors le droit d’usage), instaurons la gratuité réelle et égale pour l’éducation, la santé, l’énergie et l’eau, les transports en commun, les cantines scolaires.
Développons partout des services publics qui représentent le VRAI partage des richesses.
La difficulté à obtenir du capital des conditions décentes d’existence ne doit pas nous conduire à des solutions d’évitement, ni même d’aménagement de ce système qui chaque minute prouve sa barbarie.
Ce qui permet la remise en cause des conquis sociaux, c’est l’émiettement du monde du travail, la mise à mal de la solidarité, le poids et la peur du chômage, la force des patrons et des dominants est de nous renvoyer à notre seule individualité, en cassant le collectif et le commun.
Oui il faut partager les richesses, mais nous estimons malgré l’extrême urgence, qu’exister ce n’est pas seulement avoir un revenu, la contribution qu’on apporte à une fonction collective, sociale et historique est capitale.
Dans ce marécage social, économique et politique, il y a ceux qui sacralisent l’emploi, le plein emploi et la « sacro-sainte » croissance et ceux qui rejettent toute forme d’emploi. Au milieu, il y a nos vies et nos survies.
Réduisons le temps de travail, instaurons une semaine de congés payés supplémentaires et décrétons la retraite pour toutes et tous à au maximum 60 ans, favorisons des formes alternatives d’emplois comme les coopératives plutôt que de pousser l’auto-entreprenariat.
Nous ne revendiquons pas des emplois pour des emplois, en tous les cas pas n’importe lesquels et à n’importe quel prix. Mais nous pensons que le salariat qui exploite et contraint, ce salariat et son lot de soumission qu’il faut abolir, n’est pas le forme finie du travail. Il est par ailleurs temps de faire la différence entre emploi et travail.
Nous pensons que le travail est socialisant et structurant. Et que même quand le salariat et l’exploitation seront abolis, il y aura encore beaucoup de travail et pour longtemps, ne serait-ce que pour satisfaire les immenses besoins, ici et partout dans le monde.
La mise en place d’un revenu Universel, réellement universel ou d’existence, qui permette d’exister réellement, n’est pas moins utopique que de dépasser le capitalisme qui crée autant de violence et de pauvres que de biens de consommation et de profits.
Nous pensons qu’il y a parfois de la condescendance dans ce(s) projet(s) de revenu d’existence, car ceux qui le proposent, ont des emplois qui les passionnent où ils passent beaucoup de temps.
De plus, selon les propositions, il y aurait refonte des droits sociaux existants et qu’au final, le reste à vivre, seule donnée importante, ne serait pas vraiment en augmentation.
Il s’agit selon nous bel et bien d’une étape décisive du libéralisme, émanant des libéraux de gauche comme de droite, dont certains s’ignorent. Ce qui révèle à la fois impuissance et/ou volonté idéologique.
Philippe Villechalane
Porte parole de l’Apeis